20.4.16

Naples s'est endormie aux pieds du monstre
















































Depuis des années, Naples offre deux visages : haut lieu culturel, au passé communiste et ouvrier, elle est aussi la ville de la Camorra, des petits boulots et de la contrefaçon. Nous nous sommes plongés dans la premiere et n'avons eu qu'un aperçu de la seconde.

Naples est sans nul doute la ville la plus baroque d'Italie. Apres son éclosion a Rome, le baroque prit son essor dans la ville au pied du Vesuve.
Le centre historique se visite a pied de Spaccanapoli a l'ancien Decumanus major, la voie romaine, jusqu'au quartier espagnol. Un réseau irrégulier et un tracé en damier rappellent les époques médiévales et espagnoles de Naples. De vieux immeubles côtoient des chefs d'oeuvres d'architectures, des églises somptueusement décorées. Avec un brin d'imagination on perçoit aisément le faste passé de ses bâtiments.  

Le premier joyau découvert fut une grande toile du Caravage, les sept oeuvres de la miséricorde au dessus de l'autel de l'église Pio Monte della Misericordia sur la via dei Tribunali.
Puis vint le monastère et le cloitre Sainte Claire datant du XIVe siècle. Le cloître est extraordinaire avec ses nombreuses colonnes et ses bancs en majolique, cette faience italienne de la Renaissance, bleue, verte et jaune qui date de 1750. Partout des fresques décorent les murs.
Puis une succession de salles exhibent une étonnante collection de creches napolitaines avec santons du XVIe au XIXe siècle. La creche serait née dans le sud de l'Italie ou elle devient vite un  incontournable des fetes de Noel dans toute l'Europe. Les plus célèbres, parce que les plus abouties, furent les creches napolitaines, dont la reputation date du XVe siècle. On y fabriqua les plus belles figurines en terre cuite, elles se transformèrent en terre vernissée, colorée, elles atteignirent la taille humaine et furent parées d'habits en tissus. Au XVIIIe et dans la premiere moitié du XIXe siècle, la realisation des creches connut un veritable engouement et devint aussi le passe temps favori de la haute aristocratie et de la bourgeoisie napolitaine qui rivalisèrent d'imagination pour aménager des scenographies toujours plus recherchées. Les creches devinrent plus profanes et les plus importantes comptent plusieurs centaines de sujets qui envahirent  les salles et les terrasses des maisons et des palais napolitains. Cette passion pour la creche a Naples suscita une telle frénésie collective qu'elle entraina les meilleurs artisans du siècle dans la realisation de figurines. Tout comme les santons de Provence, chacune d'entre elles a une histoire.

Autre emotion forte, la statue en marbre blanc du Christ voilé  (Christo velato) se trouve dans la chapelle San Severo. La légèreté du voile taillé dans le marbre qui laisse entrevoir ses blessures est un aspect très touchant. Il me semblait que si je soufflais sur celui-ci il s'envolerait comme une volute. Il est possible de demeurer un long moment auprès de cette sculpture en se laissant imprégner du moindre detail. 

Un autre classique du centre historique, ce sont les linges étendus (panni stesi). Toute l'année par n'importe quel temps, on y trouve du linge étendu aux fenêtres. A tel point qu'un proverbe populaire en napolitain dit Ma sti pann nun s'asciuttano maje?(mais ces linges, ne sèchent-ils donc jamais?)
Le linge aux fenêtres est bien l'expression de la pauvreté, les logis sont trop exigus pour y être étendu. Les poubelles qui débordent, elles, sont l'expression d'un service public démissionnaire.

Le quartier charmant sur la colline du Vomero offre une vue imprenable sur la baie de Naples et au loin, majestueux, le Vesuve. On y devrouve de riches palais bourgeois couleurs pastels et une perle du baroque : la Certosa de San Martino. La chartreuse a été transformée en musée ou se trouve la quintessence de l'art baroque italien, napolitain en particulier : marqueterie, fresques, mosaïques... Une plongée dans la Naple au passé  riche et fastueux.