22.9.16

Al Jabal Al Akhdar




















































A peine deux semaines après que les enfants aient repris le chemin de l'école, nous nous trouvions deja riches de huit jours de vacances. J'embarque tout naturellement ma famille pour un voyage a la découverte de l'épine dorsale du Sultanat d'Oman, a savoir la région montagneuse de al Jabal al Akhdar, au Sud de Mascate.

Cette haute chaine de montagne semble avoir été façonnée par les siècles, sculptée par les morsures du vent, délavée par la puissance incessante des rayons du soleil. Les plis de la montagne abritent des villages perches, des plantations de dattiers, des terrasses cultivées vertigineuses a flan de montagne.
Apres six heures de voiture, quatre-vingt dix minutes de tracasseries administratives au poste frontalier, nous découvrons a 2000 mètres d'altitude, camouflé en pleine nature austère et accidentée,  l'hotel mythique d'Alila au design ultra moderne. Les architectes se sont inspires des anciennes techniques de construction et ont utilisé des matériaux de la région accordant une place privilégiée au minéral. Du balcon de la chambre qui surplombe une gorge pittoresque, le vertige vous gagne devant cette nature a l'état brut, et cette vue sans limites.

Le doux confort et le lourd silence propice a la méditation dans ces lieux magiques n'ont pas eu raison de ma curiosité maladive a vouloir rencontrer ce peuple de montagnards et arpenter leurs villages. C'est en famille que nous découvrons la vallée de l'Ayn et visitons les trois villages traditionnels de la culture de la rose, dont la floraison a lieu malheureusement en Mars et la récolte en vu d'être distillé pour la fabrication de l'eau de rose, en Avril. Nous les relions par des jardins construits en terrasses vertigineuses a flanc de montagne.
L'autre spécialité  de ces villages est la culture de la grenade dont la récolte en ce mois de septembre, occupe tous les hommes disponibles en vue de les vendre le long des routes sinueuses ou sur les petits marchés voisins et lointains. Au cours de notre ballade sur des chemins escarpés on nous offre généreusement autant de grenades que nos dix mains peuvent en contenir.
Certainement fatigues par le dénivelé du jour ou bien très attires par le programme du kid's club de l'Alila, je poursuivis seule mon périple des le lendemain.

Impossible de se fier au GPS dans une région aussi reculee dont les noms des petits hameaux changent d'orthographe au gres des traducteurs et ne figurent que sur les cartes des guides de montagne locaux. Le plan et la boussole sont assurement les instruments les plus fiables. Le 4x4, est le seul véhicule autorise a circuler sur ces routes fort pentues.
J'attribue au fait d'avoir été seule, les quelques invitations a entrer chez des villageois afin de partager un cafe, ou quelques dates. La curiosité devant ma physionomie peu courante en ces lieux recules attire invariablement les enfants qui, pour les plus jeunes, restent souvent bouche bée, les yeux equarquilles, voir chryogenises devant ce qu'ils doivent prendre pour une albinos. Ils me saluent tous par un 'how are you' répété en boucle et m'invitent parfois a rentrer dans l'enceinte de leurs maisons, s'approchent pour me serrer la main, connaitre mon prénom. Une adolescente alla meme jusqu'a m'entrainer par la manche dans une succession d'arrieres cours afin de me montrer un poulailler, dans l'espoir probablement de me vendre une galimacee.
Je surpris a leur insu deux enfants faisant la course, l'un assis sur un quad, l'autre poussant une brouette, tous deux charriant une poubelle jusqu'a la benne principale. Ou encore ces deux frères de moins de huit ans dishdasha remontée jusqu'au nombril et promenant en courant un rouleau de peinture murale au manche téléscopique.
Lorsqu'ils se montrent trop pressants ou nombreux, un simple geste associe au mot 'photo?' les font m'abandonner prestement. Il en est de meme pour les chèvres au poil long omniprésentes et encore en plus grand nombre que les enfants, voir parfois les seules flâneuses de petites bourgades perdues.

Je remercie la providence qui me fit croiser le chemin de ce notable mascadien venu rendre visite a sa soeur dans le village de Al Qash et accompagné de sept compagnons, tous fraichement rases, arborant fièrement des dishdashas d'un blanc immaculé et sans pli, et le couvre chef traditionnel des citadins, le kumma.  Ne pouvant photographier cette jolie procession sans me faire remarquer, je fis mine de faire la mise au point de mon appareil photo sur une maison non loin de la. On m'aborda en anglais et je saisis l'occasion pour poser des questions sur leurs coutumes vestimentaires. En guise de réponse on m'invita a les accompagner dans une grande demeure et je fus accueillie par la doyenne des lieux aussi ridee qu'un fruit de la passion a point, aux yeux bleus translucides et d'une jeune femme enceinte. On me poussa dans une pièce ou siégeaient une quinzaine de femmes. Seules les très jeunes mères occupaient une banquette avec leurs progénitures sur leurs seins. A peine assise en tailleur et les formules de politesse échangées, que les mères se mirent a me charger les bras, les flancs, le dos de leurs progénitures afin de prendre des photos. Je suis devenue l'arroseur arrose, victime de ma différence et de l'hilarité générale. On fit venir dans la pièce d'autres enfants, pour les faire poser a mes cotes, puis les voisines, certainement averties de ma présence par le fameux telephone arabe, défilèrent en rang d'oignons afin de me serrer la main. Pendant tout ce temps les femmes mures étalaient maints bols en plastique de couleurs vives dont le contenu m'était difficilement identifiable.  On voulu me nourrir ou plutôt me gaver, je fis de la résistance lorsqu'on me présenta a doigts nus une bouchée d'un amalgame de viande. Je suis sure de les avoir offensées en refusant tous les mets disponibles dans leur cuisine a part cette date jaune que je m'efforçais de mastiquer et gardais le noyau sur le cote gauche de ma bouche n'osant le recracher. 

Je ne sais pas combien de temps je suis demeurée captive de ce joli harem, ni combien de tentatives furent veines avant que je ne réussisse a m'éclipser. Je me retrouvais dans la ruelle aussi lessivée qu'un torchon passe en machine mais heureuse de pouvoir enfin me séparer de mon noyau de date qui commençait a faire corp avec ma joue interne.
Pas de cliches témoignants de cette belle rencontre, seulement des mots couches sur papier virtuel. La peur de les affoler me fit pour une fois, ranger bien sagement mon appareil photo.